France: Enquête du PNAT sur une filiale en Centrafrique du groupe Castel
01.07.2022 17:01
Le parquet national antiterroriste français (PNAT) a ouvert une enquête pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre contre une filiale centrafricaine du géant français des boissons Castel, a-t-on confirmé vendredi de source p
PARIS (Reuters) – Le parquet national antiterroriste français (PNAT) a ouvert une enquête pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre contre une filiale centrafricaine du géant français des boissons Castel, a-t-on confirmé vendredi de source proche du dossier.
Le groupe, par la voix d’un porte-parole, a dit à Reuters prendre acte de la décision et « coopérer avec les autorités ».
Cette enquête intervient dans le sillage d’un rapport publié en août 2021 par l’ONG The Sentry https://thesentry.org/reports/culture-de-la-violence, accusant la Sucrerie Africaine de Centrafrique (Sucaf RCA), exploitée par le groupe Castel, d’avoir « financé des milices armées responsables d’atrocités de masse » afin de « protéger ses parts de marché dans le secteur sucrier », dans le cadre d’un « accord tacite » ayant couru de la fin 2014 – période marquée par une grave crise politique et sécuritaire en République centrafricaine – jusqu’en mars 2021.
Selon l’ONG, la Sucaf RSA aurait notamment négocié avec l’Unité pour la paix en Centrafrique (UPC), qui est accusée d’exactions. Les milices armées auraient été rétribuées via un « système sophistiqué et informel » de « paiements directs et indirects en espèces », ainsi qu’en nature, sous la forme « d’entretien des véhicules et de fourniture de carburant ».
Les plantations et la raffinerie de la Sucaf RSA sont situées à Ngakobo, à 400 km à l’est de Bangui, un territoire contrôlé par l’UPC.
John Prendergast, co-fondateur de The Sentry, se félicite vendredi dans un communiqué d' »une étape importante sur la voie de la justice » qui confronte les entreprises à leurs responsabilités dans les pays en guerre.
Cette enquête, comme la mise en examen de Lafarge pour « complicité de crimes contre l’humanité » en Syrie, est « un signal fort » adressé aux multinationales, estime-t-il.
A la suite des révélations de The Sentry, Castel avait indiqué en août 2021 dans un communiqué avoir « saisi son comité d’éthique dans le but de diligenter immédiatement une enquête, conformément à ses procédures internes ».
Le 18 mai dernier, dans un autre communiqué, le groupe annonçait qu’au terme de près de six mois d’investigations ayant mobilisé plusieurs experts et intervenants, les accusations de The Sentry n’avaient pas « été corroborées par des éléments matériels et/ou informations collectés ».
(Reportage Tassilo Hummel et Sarah Morland; version française Myriam Rivet et Sophie Louet, édité par Tangi Salaün)