Un producteur français de sorgho brave la sécheresse grâce à l’agriculture durable
15.08.2022 13:39
Le champ de sorgho de l’agriculteur français Eudes Coutte, à Saint-Escobille, au sud de Paris, se démarque par ses feuilles vertes et ses grappes bien fournies tandis que dans le reste de la région, les plants de maïs rabougris et les sols desséché
par Sarah Meyssonnier
SAINT-ESCOBILLE, France (Reuters) – Le champ de sorgho de l’agriculteur français Eudes Coutte, à Saint-Escobille, au sud de Paris, se démarque par ses feuilles vertes et ses grappes bien fournies tandis que dans le reste de la région, les plants de maïs rabougris et les sols desséchés témoignent des températures estivales extrêmes.
Depuis quatre ans, Eudes Coutte et son frère cultivent le sorgho, une céréale peu connue en Europe mais largement utilisée dans le monde, qui peut servir à la fabrication de pâtisseries sans gluten, de couscous ou même de bière.
Selon l’agriculteur, la culture du sorgho apporte de nombreux avantages car il ne nécessite pas d’utiliser des pesticides, demande peu d’engrais – un tiers des besoins exigés par le blé – et ne requiert pas de système d’irrigation danpartie de la France, comme au nord de la Loire, où se trouve sa plantation.
« La culture de Sorgho apporte une nouvelle façon de penser l’agriculture et d’aller plus dans une agriculture durable, qui préserve les ressources de demain », a déclaré Eudes Coutte, 40 ans, dans sa plantation de sorgho située à 75 km au sud de la capitale française.
« Nous devons penser à l’agriculture de demain et comment on peut cultiver et produire des aliments sans avoir recours à l’eau ».
Comme toutes les céréales, les rendements du sorgho tomberont également en raison de la chaleur extrême qu’a connue la France cette année, jusqu’à trois-quatre tonnes par hectare, contre cinq-six tonnes récoltées lors des années sans sécheresse, estime l’agriculteur.
Toutefois, le fait que ses cultures, situées au nord de la Loire, ne nécessitent pas d’irrigation, constitue un « avantage concurrentiel », estime-t-il, alors que la sécheresse et les restrictions d’eau se font sentir dans toute la France.
Afin de rendre l’exploitation plus durable, Eudes Coutte a investi dans son propre moulin en pierre, lui permettant de transformer une partie de sa récolte en farine de sorgho sans gluten. Le reste des céréales est vendu en grains, qui peuvent être cuits et consommés comme des lentilles.
Le sorgho sans gluten est riche en protéines et contient huit des neuf acides aminés essentiels, a-t-il expliqué, mais en Europe, cette culture reste un marché de niche.
Davantage d’agriculteurs comme les frères Coutte se tournent cependant vers ce type grain, et la production française de sorgho a augmenté pour atteindre près de 400.000 tonnes en 2021, contre 244.000 tonnes en 2016, selon les données du ministère de l’Agriculture.
Sur les quelque 800.000 tonnes de sorgho produites en Europe entre 2021 et 2022, seul un quart environ sera destiné à la consommation humaine, le reste étant principalement réservé à l’alimentation animale, montrent les données de l’UE.
Selon Vincent Braak, analyste chez Strategie Grains, le sorgho a gagné du terrain en Europe ces dernières années, mais son marché, moins développé que celui du maïs ou d’autres céréales, peine à s’établir.
« Pourtant, avec des étés de plus en plus chauds, on peut s’attendre à ce que davantage d’agriculteurs se mettent à cultiver du sorgho pour remplacer une partie de leur maïs », estime-t-il.
Les frères Coutte redoublent d’efforts pour trouver de nouveaux marchés pour leur production. Dans les années à venir, ils prévoient de s’associer à des partenaires locaux pour développer de la bière de sorgho, du steak de sorgho végétarien et d’autres produits à base de cette céréale.
(Reportage Sarah Meyssonnier, avec la contribution de Gus Trompiz, rédigé par Geert De Clercq ; version française Dagmarah Mackos, édité par Kate Entringer)