La police israélienne intervient dans la mosquée Al Aksa, colère palestinienne

par Nidal al-Mughrabi et Sinan Abu Mayzer

GAZA/JERUSALEM (Reuters) – La police israélienne est intervenue mercredi avant l’aube à l’intérieur de la mosquée Al Aksa, à Jérusalem-Est, pour en déloger ce qu’elle a qualifié d’agitateurs masqués.

Cette intervention dans l’un des principaux lieux saints de l’islam a suscité la colère des Palestiniens en Cisjordanie et a été suivie de tirs de roquettes en direction d’Israël en provenance de la bande de Gaza.

Ces incidents surviennent en plein ramadan, mois sacré des musulmans, et à la veille de la Pâque juive, dans un climat de tensions croissantes depuis un an entre Israéliens et Palestiniens.

Des affrontements en 2021 sur le complexe de la mosquée Al Aksa avaient dégénéré en une guerre de 10 jours entre Israël et Palestiniens de la bande de Gaza, gouvernée par les islamistes du Hamas.

Au moins neuf roquettes ont été tirées de Gaza au cours de la nuit. Israël a riposté par des bombardements aériens sur ce qu’il a présenté comme des camps d’entraînement du Hamas. De puissantes explosions ont retenti à travers le territoire enclavé.

Selon des témoins, des chars israéliens ont aussi bombardé des positions du Hamas le long de la clôture frontalière dans le sud de la bande de Gaza.

Le Croissant-Rouge palestinien a fait état de 12 Palestiniens blessés par des balles en caoutchouc et des coups de matraque dans les affrontements avec la police israélienne à la mosquée Al Aksa. Il a ajouté que les forces israéliennes l’empêchaient de se rendre sur place.

« Dans la cour située dans la partie orientale du complexe, la police a tiré des grenades lacrymogènes et assourdissantes, c’était une scène indescriptible », a dit Fahmi Abbas, fidèle présent dans la mosquée. « Puis ils sont entrés de force et ont commencé à taper sur tout le monde. Ils ont arrêté des gens et allongé les jeunes face contre terre en continuant à les battre. »

CONDAMNATIONS ARABES

Dans un communiqué, la police israélienne a dit avoir été contrainte d’intervenir dans la mosquée dans laquelle s’étaient retranchés des agitateurs masqués équipés de feux d’artifice, de bâtons et de pierres.

« Quand les policiers sont entrés, des pierres ont été lancées dans leur direction et des feux d’artifice ont été tirés de l’intérieur de la mosquée par un groupe important d’agitateurs », a dit la police israélienne dans ce communiqué, ajoutant que l’un de ses membres avait été blessé à une jambe.

Des milliers de fidèles musulmans ont passé la nuit dans le complexe religieux, ce qui nourrit la crainte d’affrontements avec des fidèles juifs susceptibles de se rendre sur le site, lieu le plus sacré du judaïsme qu’ils appellent le mont du Temple.

Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux, que Reuters n’a pas pu authentifier dans l’immédiat, ont montré des tirs de feux d’artifice et des personnes battues par des policiers à l’intérieur de la mosquée.

D’après l’avocat palestinien Firas al Djibrini, la police israélienne a arrêté un demi-millier de personnes.

L’Autorité palestinienne, installée en Cisjordanie occupée, a qualifié l’assaut contre des fidèles de crime.

« Nous mettons en garde l’occupant contre tout franchissement de la ligne rouge dans les lieux saints, qui mènera à une grande explosion », a dit Nabil Abou Roudeïneh, porte-parole du président palestinien Mahmoud Abbas.

L’arme israélienne a déclaré que l’un de ses soldats avait été blessé par balles lors d’affrontements avec des Palestiniens à Beit Oummar, en Cisjordanie.

Au cours de l’année écoulée, les forces israéliennes ont arrêté des milliers de personnes et tué plus de 250 Palestiniens en Cisjordanie, tandis que des attaques palestiniennes sur le sol israélien ont fait plus de 40 morts.

Israël s’est emparé de Jérusalem-Est, où se trouve le complexe de la mosquée Al Aksa, en 1967 puis l’a annexé, une initiative non reconnue par la communauté internationale.

Les Palestiniens souhaitent faire de Jérusalem-Est la capitale d’un Etat indépendant regroupant la Cisjordanie et la bande de Gaza.

L’intervention israélienne sur le complexe d’Al Aksa a suscité une vive réaction des pays arabes.

La Jordanie et l’Egypte, les deux premiers pays arabes à avoir signé un traité de paix avec Israël, ont fermement condamné ces incidents dans des communiqués distincts tandis que l’Arabie saoudite, avec laquelle Israël espère normaliser ses relations, a déclaré que « l’assaut » israélien sapait les efforts de paix.

(Reportage Sinan Abu Mayzer, Ammar Awad, Ali Sawafta et Nidal al-Mughrabi, avec Nisreen Salem, rédigé par Henriette Chacar; version française Camille Raynaud et Bertrand Boucey, édité par Kate Entringer)

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