Accord sur les céréales entre Pologne et Ukraine, inquiète pour la mer Noire
18.04.2023 20:36
© Reuters. Vue du terminal céréalier avec silo à grains dans le port de Constanta, sur la mer Noire, en Roumanie. /Photo d’archives/REUTERS/Olimpiu Gheorghiu
par Pawel Florkiewicz, Marek Strzelecki et Anna Wlodarczak-Semczuk
VARSOVIE (Reuters) – La Pologne a accepté mardi de lever son interdiction sur le transit de céréales et d’autres produits alimentaires ukrainiens, une décision réclamée par l’Ukraine qui a exprimé par ailleurs son inquiétude sur l’avenir de l’accord scellé avec la Russie pour les livraisons via la mer Noire malgré la guerre sur son territoire.
Relancer les exportations vers les pays d’Europe de l’Est et prolonger l’accord pour la mer Noire sont cruciaux pour l’Ukraine, sous peine de voir de grandes quantités de céréales rester bloquées dans le pays, avec pour effet de peser encore davantage sur l’économie locale.
Pologne, Hongrie et Slovaquie – trois pays membres de l’Union européenne – ont mis en place un embargo sur des importations ukrainiennes afin de protéger leurs marchés face à un afflux croissant de produits à bas coût.
Varsovie avait aussi décidé, au cours du week-end, d’interdire le transit des céréales et d’autres produits alimentaires ukrainiens sur le territoire polonais.
Une avancée a toutefois été obtenue mardi, après deux journées de discussions entre Varsovie et Kyiv, a fait savoir le ministre polonais de l’Agriculture, Robert Telus, indiquant que les cargaisons en transit seraient scellées et surveillées. Cet accord entrera en vigueur vendredi, a déclaré un autre membre du gouvernement polonais.
S’exprimant au cours d’une conférence de presse à Varsovie au côté de Robert Telus, la vice-Première ministre ukrainienne Ioulia Svyrydenko a exprimé son optimisme sur le respect par les exportateurs ukrainiens des termes de l’accord conclu avec la Pologne.
Alors que la Roumanie semblait pencher elle aussi pour un embargo sur des importations ukrainiennes, on ne pouvait pas déterminer dans l’immédiat l’impact que la décision de la Pologne pourrait avoir sur les autres pays de la région.
Des goulots d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement de céréales en Europe centrale et orientale ont provoqué une chute des prix et nui aux agriculteurs, avec pour effet une pression politique sur les gouvernements locaux – particulièrement en Pologne où se profile une élection.
Un haut représentant de l’UE a déclaré que des émissaires des pays du bloc allaient se réunir mercredi pour discuter de mesures communes, Bruxelles ayant critiqué les Etats membres qui ont décidé des interdictions unilatérales.
En marge de ces mesures européennes, l’Ukraine craint de voir prendre fin l’accord scellé en juillet dernier avec la Russie sous l’égide de l’Onu et de la Turquie pour garantir les expéditions de céréales ukrainiennes via la mer Noire.
Moscou a menacé de ne pas renouveler l’accord, destiné à protéger trois ports ukrainiens en marge de la guerre, qui doit expirer le 18 mai, citant le non-respect de mesures sur les exportations agricoles russes.
Déclarant que la Russie avait « de nouveau bloqué l’inspection des navires » en mer Noire, Ioulia Svyrydenko a souligné devant les journalistes l’importance de la reprise du transit des exportations ukrainiennes et de ne pas laisser à la Russie « l’opportunité de profiter de la situation ».
La presse officielle russe a rapporté dans la journée que les inspections avaient repris, ce qu’a démenti Kyiv.
(Reportage Pawel Florkiewicz et Anna Koper à Varsovie, Luiza Ilie à Bucarest, Krisztina Than à Budapest, Pavel Polityuk à Kyiv; version française Bertrand Boucey et Jean Terzian)